Fiche de lecture n°10

Publié le par lieutenantrahmani

 

Amazigh : L’homme Libre.

 « La terre n’est qu’un seul pays dont tous les hommes sont les citoyens, un seul village à la suite des découvertes scientifiques et de l’inter-dépendance indéniable des nations. On peut aimer tous les peuples du monde tout en aimant son propre pays. »

 

« La vérité est comme la mer, elle n’apparaît qu’une fois rejetée sur le rivage. Quel dommage qu’il faille tant de naufrages pour enfin l’apercevoir. »

Abdelkader Rahmani.

 

 

 

Fiche de lecture n°10

De l’Université de l’Ignorance

8 avril 2012

 

 

 

 

« Notre-Dame des Douleurs »

de Israël Adam Shamir, èd BookSurge 2006

 

Monsieur Shamir, (écrivain/journaliste juif converti au christianisme) m’a dédicacé son livre, d’une poignante actualité…

 

(p.9-10) Avertissement

 

Depuis des années, j'en appelle, dans mes écrits, à l'égalité totale pour tous les habitants de la Palestine, à un seul Etat et à l'égalité des droits pour tous ses citoyens, dont le droit de vote, que ce soit pour un juif ashkénaze de Ramat Aviv ou pour un Palestinien de Naplouse, pour un juif marocain d'Ofakim ou pour un Russe de Haïfa. J'exhorte à casse!' toutes les lois qui établissent une discrimination entre un juif et un non-juif, en particulier l'infâme loi des "propriétaires absents" qui a permis la confiscation des maisons et des champs des Palestiniens), Dans la page d'accueil de mon site www.israelshamir.net, il est écrit en toutes lettres: "Avec Edward Said, Israël Shamir prône l'instauration du principe "Un Homme - Une Voix - Un État" dans notre Palestine bien-aimée (la Terre d'Israël), entière et indivise, sans ligne verte ni ligne violette, ni Mur de sécurité. Un État pour nous tous, indigènes et fils adoptifs de Palestine, "Vous aurez une seule loi", dit la Bible. J'appelle à ce que soit étendu le droit de vote, dès les prochaines élections, à l'ensemble des habitants de la bande de Gaza et de la Cisjordanie et à incorporer ces territoires dans un État unique.

 

C'est là l'essentiel de mon enseignement, tout le reste n'est que commentaires. Si ce à quoi j'appelle est du "racisme", alors la guerre éternelle s'appelle sans doute "paix et sécurité" et la redoutable Shabak (la police secrète israélienne) "Ministère de l'Amour"? Depuis des années, j'appelle les habitants de Sion à tendre la main à nos frères, les fils et filles de Palestine, et à vivre avec eux en paix et dans l'amour fraternel, comme nous le vivons, dans ma ville de Jaffa, sur la côte. Hélas, les directeurs des quotidiens israéliens refusent de publier cet appel.

 

Ils fournissent une tribune à n'importe quel raciste. Ils servent d'amplificateurs à n'importe quel appel au transfert des Palestiniens et à la purification ethnique. Mais mes appels à l'égalité ne peuvent s'y exprimer.

 

Il ne s'agit pas seulement de mon opinion personnelle: un sondage du quotidien Ha 'aretz a montré que 30 % des habitants du pays sont en faveur de cette solution, car il n’y en a pas d'autre. Il n’y a aucune chance qu'un État palestinien puisse être créé dans des frontières telles qu'elles garantissent l'équité. Si c'était possible, il y a longtemps que cela aurait été fait. Tant qu'il n'y aura pas d'égalité pour les Palestiniens, il n'y aura pas d'égalité pour les autres communautés, ni pour les Juifs orientaux, ni pour les Russes. Le front électoral récemment constitué par l'alliance entre Russes et Palestiniens est le premier pas en direction de la nouvelle réalité: une Palestine pluraliste pour toutes ses communautés.

 

(p.213 à 219) L'offensive de Pâques (Joyeuses Pâques ! Joyeuses barbaries ! A.R)

 

La notion théologique prévalant aujourd'hui en Amérique pourrait être qualifiée d'approche "judéo-américaine", mais ses adeptes lui préfèrent l'intitulé plutôt trompeur de 'judéo- chrétienté". Selon les enseignements de cette "judéo-chrétienté", il n'y a pas autant de différence que ça, entre (les) deux religions rivales. Le christianisme enseigne qu'Il est venu et qu'Il reviendra; tandis que le judaïsme considère que le Messie, qui est pourtant le Christ, n'est pas encore venu. Voilà. C'est tout. Simple, non? Mais la réalité est tout autre.

 

Le Christ est Dieu, alors que le Messie du judaïsme rabbinique, lui, est l'Homme. Le Christ, c'est Dieu pour tous les hommes; le Messie est pour les seuls juifs. Le judaïsme et le christianisme sont deux systèmes de croyance diamétralement opposés. Un juif et un chrétien peuvent être les meilleurs des amis, ils peuvent même être père et fils, ou mari et femme. Mais, idéologiquement, il y a entre eux plus de différence qu'il n'y en a entre un néoconservateur et un trotsko.

 

Le christianisme et le judaïsme présentent deux approches différentes - en réalité: opposées. Leur conflit séculaire résulte d'une compétition naturelle. En apparence, les deux croyances-sœurs sont semblables: toutes les deux, elles célèbrent (au moment de Pâques / Pessah) leur sacrifice consenti, au moyen d'un récit - la liturgie de la Passion, chez les chrétiens, et la récitation en famille de la Haggadah, chez les juifs. Mais, en réalité, chrétiens et juifs ne pourraient différer plus. Le récit de la Pâque juive est une réponse à la Passion. Dans le judaïsme biblique, le sacrifice de la Pâque était exécuté dans le Temple. Après la Résurrection du Christ et la destruction du Temple, la vieille coutume a disparu, et l'histoire de la Passion chrétienne a commencé à être récitée et jouée sur scène. Les Rabbins ont alors créé une nouvelle liturgie flambant neuve, antichrétienne: la Haggadah de la Pâque. Elle consiste en la récitation, en famille, d'interprétations exégétiques de l'Exode. Le Professeur Yuval a apporté la démonstration qu'on ne récitait pas la Haggadah antérieurement à l'avènement du christianisme. De plus, cette liturgie a été créée en réponse aux Mystères de la Passion. La Passion est le récit de l'autosacrifice suprême de l'Élu pour le salut universel. La Haggadah est, quant à elle, le récit du sacrifice des ennemis et la célébration du salut des Élus, À Pâques, les chrétiens célèbrent la résurrection de quelqu'un qui s'est sacrifié pour nous. Il s'agit de l'affirmation d'un altruisme suprême. La Pâque juive exprime une idée totalement opposée à celle-ci: ce dont il y est question, c'est de notre salut, à nous, et de leur extermination, à eux. Les Égyptiens et les Cananéens doivent être sacrifiés, pour que nous puissions vivre mieux: telle est l'idée de la Pâque - c'est l'affirmation d'un égoïsme national.

 

La différence n'est pas purement scolastique, il s'agit aussi d'une question de pratique. Depuis l'ascension du paradigme juif, les nations riches sacrifient les nations pauvres à l'amélioration de leur confort. La pauvreté croissante du Tiers Monde en apporte la preuve. Examinons les chiffres. Entre 1960 et 1980, le revenu par personne, en Amérique latine, a connu une croissance de 73 %, et en Afrique, de 34 %. Au cours de la période de "libéralisation" - autrement dit: de l'ascension du paradigme juif (de 1980 à 2000), cette croissance a plongé, connaissant un étiage à 7 % en Amérique latine et - encore pire - elle s'est inversée, chutant jusqu'à - 23 % en Afrique'. Est-ce là "l'œuvre des juifs"?, demande le lecteur. Certainement pas. Les juifs et les chrétiens s'influencent mutuellement. Lorsque c'est l'influence chrétienne qui prévaut, les juifs se tournent vers des interprétations plus clémentes, et deviennent "une bénédiction pour toute l'humanité". Qu'en revanche prévale l'influence juive, et les chrétiens se comportent comme les pires des juifs. Car nous ne devons pas parler de "juifs", mais du "paradigme juif', qui peut tout aussi bien exister sans les juifs. Une personne d'origine juive n'est pas nécessairement un porte-drapeau de l'idéologie juive. Il n'y a nul besoin de lutter contre "les juifs", mais bien, en revanche contre le "paradigme juif" sous toutes ses formes, dans ses diverses manifestations.

 

Ce paradigme ne connaît aucune frontière; il agit à l'intérieur de la "métropole", aux États-Unis aussi. Là, les riches sacrifient les moins opulents afin de pouvoir vivre encore mieux. Une étude récente, Divergent Paths, montre que 90% des jeunes travailleurs américains vivent plus difficilement qu'ils ne l'auraient fait il y a vingt ans. Depuis 1980, seul un petit pourcentage d'Américains a amélioré sa situation; quant aux autres, les perspectives de "mobilité vers le haut", d'ascension sociale, sont plus que sombres. Chez le meilleur allié des États-Unis, en Grande-Bretagne, les chiffres sont encore pires. Ces deux pays connaissent aujourd'hui une jeunesse mal éduquée et un système sanitaire déficient. Sur cette même période, les riches sont devenus beaucoup plus riches encore, nous apprend cette étude; tandis qu'aux États-Unis, le revenu moyen, dans la communauté juive, équivalait au double de celle des Américains de la gentilité. Le contraste serait encore plus convainquant si nous comparions les Américains ordinaires avec les néo-juifs, c'est-à-dire avec les partisans idéologiques du paradigme juif (regroupant l'idéologie néolibérale et le sionisme). En Israël, les Juifs disposent en moyenne d'un revenu huit fois supérieur à celui des Gentils, tandis que le fossé entre les néo-juifs fortunés et les juifs ordinaires est important, lui aussi. Nulle part la praxis de la querelle Pâque / Pâques n'est aussi évidente qu'en Palestine. À leur arrivée en Palestine, les juifs étaient très pauvres. L'administration britannique mit en vigueur un statut local n'autorisant à Jérusalem que des constructions en pierre de taille. La pierre coûtait très cher. Les juifs étaient pauvres, et ce statut fut qualifié d' "antisémite". En 1948, les belles demeures en pierre de taille des Gentils de Jérusalem furent confisquées et remises aux Juifs, tandis que leurs propriétaires en titre étaient rejetés vers les camps de réfugiés. Ils continuent à languir dans la pauvreté, à seule fin que nous puissions vivre mieux. Sur les collines dénudées qui entourent Hébron, les villageois palestiniens n'ont pas d'eau, et leurs troupeaux meurent à côté de sources taries. L'eau de source s'évacue, par conduites, en direction de la piscine d'une colonie juive. C'est, là encore, une mise en pratique de la maxime: "Qu'ils crèvent, si cela nous permet d'améliorer notre confort". Dans la ligne de la Pâque juive, le Talmud postule, en matière de priorités d'accès à l'eau d'un puits: "La lessive d'un juif a précellence sur la vie même des Gentils". Cela est mis en pratique, dans la vraie vie, en Israël.

 

La théologie est idéologie, et il n'y a aucune place pour un quelconque compromis idéologique entre ces paradigmes opposés. Aujourd'hui, il nous faut choisir ce que nous célébrons: l'altruisme de Pâques, ou l'égoïsme de la Pâque. Rien qui n'attire plus que le succès, et nous vivons des années de succès sans précédent pour le paradigme juif. Des Musées de l'Holocauste supplémentaires ont été construits, le soutien des États-Unis à Israël, bien que déjà énorme, s'est encore renforcé. En 1956, aux États-Unis, un juif gagnait en moyenne autant qu'un chrétien, et les États-Unis furent en mesure d'ordonner aux troupes israéliennes de se retirer du Sinaï. Aujourd'hui, le revenu moyen des membres de la communauté juive américaine a atteint le double de celui d'un WASP (White Anglo-Saxon Protestant), et l'administration américaine saute obligeamment dans le cerceau que lui tend son dompteur, Ariel Sharon.

 

"Est-ce que c'est bon pour les juifs?" était la question rituelle que posait ma grand-mère. Enfant juif rebelle, je rejetais cette question, disant: "Ce qui est bon pour tout le monde est bon pour les juifs aussi". Ma grand-mère n'était pas convaincue. Aujourd'hui, je ne suis plus si sûr de moi-même. On dirait que les tendances et les intérêts du peuple et ceux des juifs syndiqués divergent à nouveau, après un intermède long d'un siècle. Après tout, traditionnellement, "les juifs" étaient du côté du roi, contre le peuple. Tandis que "les juifs" opéraient ce tournant à cent quatre-vingts degrés, de nombreux juifs sont restés avec le peuple contre la Juiverie organisée. Ce sont nos merveilleux camarades d'armes. Finkelstein et Chomsky, pour n'en nommer que quelques-uns, qui ont fourni au peuple des armes excellentes, dans la guerre des idées. Notre situation n'est en rien unique. Nombreux sont les Blancs qui, en Afrique du Sud, choisirent d'être du côté du peuple, et non du côté des Blancs. De nombreux aristocrates ont opté pour le peuple, et non pas égoïstement pour leur classe. Nombreux ont été les Américains à combattre l'Amérique, durant la guerre au Vietnam. Aujourd'hui, l'heure est venue pour nous d'être "contre notre propre peuple", avec le peuple, et pour le peuple.

 

 

 

Freddy, le retour

 

Les préceptes religieux du Talmud ont inculqué à bien des juifs une approche cavalière de la propriété et de la vie même des Gentils. Il n'est pas jusqu'aux juifs non religieux qui ne doivent supporter ce fardeau hérité du passé. Si nous comparions la foi juive à une boisson euphorisante contenant des résines et essences diverses, le juif post-religieux se retrouverait quant à lui avec une lie grisâtre et toxique. C'est la raison pour laquelle des juifs non-religieux, dans les gouvernements polonais et tchécoslovaques d'après-guerre, ont approuvé le transfert d'Allemands appartenant aux minorités ethniques de ces deux pays, en 1945, et cela explique aussi pourquoi le gouvernement hongrois révolutionnaire très largement juif (dirigé par Béla Kun), procéda à des massacres de grande ampleur contre ses opposants en  1919. Les sionistes les ont tous coiffés au poteau en pratiquant les deux à la fois: les transferts de population et les massacres.

 

Les juifs ne sont pas les seuls dans ce cas, beaucoup de nations et d'États en ont usé de même. Toutefois, on relève la quasi absence de remords, chez les juifs, pour les massacres et les transferts qu'ils ont perpétrés. Le comportement pour le moins étrange de Benny Morris, le "Nouvel Historien" israélien par excellence, a stupéfait beaucoup de ses amis. Comment l'historien de la Nakbah a-t-il pu devenir ainsi un porte-parole de la droite israélienne? Il y a quelques jours, la télévision israélienne a diffusé un débat en direct sur les avantages du transfert des Palestiniens. Aucun des participants n'a soutenu cette idée, mais les partisans du transfert n'ont absolument pas été ostracisés. Ils étaient là, assis, arborant un sourire satisfait, et ils en appelaient au massacre de masse des Palestiniens, citant les massacres précédemment commis comme des preuves de légitimité. Aux informations télévisées israéliennes, la présentatrice d'un journal a pu annoncer la mort d'un sergent de l'armée israélienne, comme un grave événement, et mentionner au passage, comme un détail, la mort de cinquante Palestiniens.

 

Ce comportement impitoyable et éhonté découle de la césure artificiellement inscrite dans l'âme juive, entre ce qui est juif et ce qui ne l'est pas. Dans la hiérarchisation "juif/non-juif/animal", la différence entre les deux premiers termes est bien plus importante que celle qui oppose entre eux le second et le troisième, stipule la Taniya, un manuel d'enseignement talmudique. Cette notion est présente dans le subconscient de bien des juifs, qu'ils soient religieux ou non important peu, au demeurant. Tandis que les partisans maléfiques de Sharon assassinent des Gentils sans le moindre remords, nombreux sont les juifs à protester contre les agissements de Sharon comme ils le feraient contre des traitements cruels infligés à des animaux. Et il est de fait que les murs de Tel-Aviv comportent plus de posters protestant contre l'inhumain gavage des oies que déplorant le massacre de masse des Palestiniens.

 

(Dernière de couverture) « C'est en tombant par hasard sur les écrits prophétiques et éloquents du dissident juif Israël Shamir que j'ai compris ce qui se passe en Palestine dans toute sa profondeur historique, et pourquoi, comme le dit John Pilger, la Palestine est le véritable enjeu majeur pour le monde. Comme l'explique Shamir: 'L'Israël/Palestine est le modèle que les États-Unis veulent étendre au monde entier. Des serfs avec leurs troupeaux, en bas, mourant de soif; et sur les collines, les villas et les piscines pour les élus. Une énorme armée et des travailleurs sans le moindre droit. Il s'agit pour eux de faire du monde entier une Palestine et ils ont déclenché pour ce faire leur Troisième Guerre mondiale contre le Tiers monde. On perçoit chez Israël Shamir l'influence de John Ruskin, de Simone Weil, de Franz Fanon, de T. S. Eliot, et d'Edward Saïd. Il rejette la « double tentation de Mammon et du sionisme, » au nom de la compassion envers les « hardis paysans » de sa patrie d'adoption.» (Owen Owens)

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